72% des français pensent que le système éducatif se dégrade
À la veille de la rentrée scolaire dans le primaire et le secondaire, en 2023, Ipsos a interrogé les Français sur leur opinion à l’égard du système éducatif Français.
Depuis plusieurs années, le système éducatif français est en grande difficulté et ce phénomène s’accentue actuellement. On remarque une forte baisse du niveau des élèves. Explications.
Un système en tension
En France, le système éducatif et scolaire est en tension à toutes les échelles.
Le niveau des élèves baisse dans de nombreux domaines comme le français, les mathématiques, les sciences ou encore les langues. Pourtant, en France, les élèves font partie de ceux qui ont le plus d’heures de cours par semaine. Alors que d’autres pays européens comme l’Angleterre ou l’Espagne en ont moins. Mais les écoliers français obtiennent des résultats scolaires plus faibles, selon le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA).
L’Éducation nationale, dépassée ?
On remarque depuis un moment une certaine déception des élèves, de leurs parents et de leurs professeurs vis-à-vis de l’Éducation nationale et du système éducatif actuel.
Surcharge du système éducatif
Ces acteurs se plaignent dans un premier temps d’une surcharge des programmes du système éducatif. Les élèves n’arrivent plus à suivre les cours correctement à cause de la vitesse excessive des professeurs.
Ces enseignants sont également soumis à une pression exercée par l’Éducation nationale, avec un but premier : boucler le programme avant la fin de l’année scolaire. L’apprentissage des élèves est donc remis en question.
Un manque criant de professeurs…
Aussi, les différents acteurs et syndicats déplorent un manque de professeurs dans les différents établissements scolaires. Les enseignants absents sont rarement remplacés ce qui pose un problème et retarde l’apprentissage des élèves.
Selon une enquête menée par le syndicat SNES-FSU entre le 30 août et le 5 septembre 2024, il manquait au moins un professeur dans 56 % des collèges et lycées au niveau national lors de la dernière rentrée scolaire.
… justifié via différentes raisons
Les professeurs reprochent également au gouvernement de n’être que très peu payé comparé à la charge de travail qu’ils subissent. C’est pour cette raison que l’année dernière, de nombreuses manifestations ont eu lieu, à l’appel de syndicats soutenant les professeurs comme la CGT, le SNES-FSU et l’UNSA.
Le manque d’enseignants, dans le système éducatif actuel, peut également s’expliquer via les conditions de travail compliquées de ce métier (classe surchargée, salaire peu élevé, niveaux d’élèves mélangés) ce qui n’encourage pas les générations futures à vouloir suivre cette vocation.

Des difficultés à gérer les élèves
Un autre souci soulevé par le corps professoral : la capacité de concentration des élèves.
Les enseignants ont beaucoup plus de mal à les occuper convenablement. Les classes dans les établissements scolaires sont souvent surchargées (environ 30 élèves par classe) ce qui est de plus en plus difficile à gérer pour un seul professeur.
De plus, le niveau des élèves devient très diversifié. Chaque écolier n’avance pas au même rythme que les autres. Ces élèves en difficulté de peuvent pas recevoir de l’aide en permanence aux vues des classes surchargées.
En contrepartie, l’Éducation nationale souhaite que les professeurs soient formés davantage. Ils doivent donc participer à de nouvelles formations. Qui dit nombreuses formations, dit nombreuses absences. Celles-ci entrainent des annulations de cours. Et il n’y a personne pour les remplacer, en raison du manque de professeurs formés. C’est un cercle vicieux.
Impact de la société sur l’éducation des plus jeunes
Des inégalités sociales visibles dans les apprentissages
Les élèves sont concernés directement par les inégalités sociales dans l’éducation. On constate en France que les compétences des élèves diffèrent selon l’origine sociale à l’entrée en sixième.
Selon education.gouv.fr en 2022, 41 % des enfants ayant des parents cadres ont de bons résultats en français, contre 6 % des enfants d’inactifs et 10 % des enfants d’ouvriers. En outre, 45 % des enfants d’inactifs et 26 % des enfants dans un ménage ouvrier sont en difficulté, contre 5 % des enfants de cadres supérieurs. Le constat est le même en mathématiques. L’ampleur des inégalités sociales évolue peu en français entre le CP et la sixième mais s’amplifie en arrivant au collège.
Un niveau mesuré via des indicateurs variés
Avec la Journée Défense et Citoyenneté (JDC), mise en place depuis 1998, on vérifie le niveau de langue des élèves de chaque académie.

C’est grâce à ces statistiques notamment que l’on peut voir les différentes inégalités régionales.
On trouve un exemple flagrant entre la France métropolitaine et les DROM (départements et régions d’outre-mer). Le pourcentage des élèves rencontrant des difficultés pour la lecture dans les DROM est élevé à plus de 12 % comparé à la France métropolitaine où rare sont les départements qui dépassent ce pourcentage.
Pour la Lorraine, on observe que le pourcentage des élèves étant en difficulté pour la lecture varie entre 9 et 12 %.
On voit donc que l’éducation est très inégale en France et que le système éducatif est pratiqué différemment dans chaque région.
5,2 % des 14-16 ans ne sont pas scolarisés
Depuis quelques temps, on constate également un décrochage scolaire plus élevé que la normale. Selon les données de l’INSEE, le taux de décrochage scolaire en France est de 7,6 %, en 2022.
Une autre inquiétude : 5,2 % des 14-16 ans ne sont pas scolarisés alors que l’école est obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans en France.
Au total, sur une année, 110 00 jeunes ont quitté le système scolaire sans diplôme et 13 % des 25-34 ans ne sont pas allés au-delà du collège.
Ce décrochage scolaire est dû à plusieurs facteurs accumulés : des facteurs personnels comme des problèmes de santé mental ou des difficultés d’apprentissage, des facteurs familiaux, des facteurs scolaires comme le harcèlement ou encore des facteurs sociaux comme les mauvaises fréquentations.
Insécurité, violences, fouilles des sacs…
Maintenant, beaucoup de parents pratiquent l’école à la maison à leurs enfants depuis le confinement dû à la pandémie de Covid-19 et également à cause d’une grande insécurité présente à l’école.
Les violences au sein du système éducatif s’accentuent énormément. On observe une hausse d’harcèlement ce qui provoque des décrochages scolaires importants, une phobie scolaire et engendre parfois des drames. Selon l’Enquête harcèlement 2023 menée en février 2024, le harcèlement touche : 5 % des écoliers du CE2 au CM2, 6 % des collégiens et 4 % des lycéens.
Les élèves deviennent également de plus en plus violents entre eux mais également avec les membres du système éducatif (directeurs, professeurs, CPE, assistants d’éducation…). Il y a deux semaines, Mélanie, jeune surveillante de 31 ans qui s’est faite sauvagement poignardée à plusieurs reprises par un élève du collège de Nogent en Haute-Marne. Malheureusement, cette jeune femme est décédée et le jeune homme n’a apparemment éprouvé aucuns regrets car il voulait « faire le plus de dégâts possibles » et voulait « s’attaquer à n’importe quelle surveillante ».

Cette insécurité observée dans le cadre scolaire a engendré plusieurs fouilles des sacs pour tous les élèves à l’entrée de multiples établissement français, menées par la police nationale, la gendarmerie ou les membres du système éducatif. Ces fouilles ont déjà mené à quelques trouvailles troublantes comme des armes blanches qui ont été découvertes dans les sacs des élèves.
Une politique française instable
La dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron le 9 juin 2024 a provoqué de fortes tensions politiques. Cette instabilité politique a impacté le système éducatif français.
La France s’est retrouvée sans ministre de l’Éducation pour la rentrée 2024-2025. Ce qui a remis en cause toutes les réformes que d’anciens ministre avait mis en place comme l’obligation d’obtenir son Diplôme National du Brevet (DNB) pour pouvoir rentrer au lycée.
En moins de deux ans, la France a changé au total cinq fois de ministre de l’Éducation, ce qui n’a pas permis de concrétiser des projets sur le système éducatif. En moins d’un an, la France a également changé trois fois de Premier ministre ce qui a renversé plusieurs gouvernements successifs.
Un système éducatif perturbé
Le fait que 72 % des Français estiment que le système éducatif se dégrade traduit une perte de confiance préoccupante dans une institution pourtant fondamentale pour l’avenir du pays. Ce constat souligne la nécessité urgente de repenser les priorités éducatives, de renforcer les moyens alloués aux écoles et de restaurer un lien de confiance entre les acteurs de l’éducation, les élèves et la société.
Redonner à l’école sa mission première – transmettre des savoirs, former des citoyens éclairés et garantir l’égalité des chances – apparaît plus que jamais essentiel au temps des nouvelles technologies.
Célian CUNY