Meurtre de Mélanie à Nogent (52) : l’urgence d’un électrochoc pour la prévention des violences scolaires

Le meurtre de Mélanie, AED poignardée à Nogent, bouleverse la communauté éducative. Jean-Luc Cornesse (SNUS-FSE Haute-Marne) alerte sur l’urgence d’une réponse structurelle face aux violences scolaires et au manque de moyens.

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Corentin Fohlen | Crédits : Libération

Un syndicat appelle à un sursaut collectif après le meurtre de Mélanie

Le meurtre de Mélanie, surveillante poignardée hier à Nogent, continue de bouleverser la communauté éducative. Jean-Luc Cornesse, représentant du SNUS FSE en Haute-Marne, livre une analyse à vif, entre incompréhension et appel à une réforme de fond du système. Pour lui, « l’état de sidération » dans lequel se trouvent les collègues ne doit pas empêcher une réflexion collective sur les signaux faibles, la santé mentale des élèves et la place de la prévention dans les établissements.

meurtre de Mélanie

« Une sidération totale » : l’émotion après le meurtre de Mélanie

« Comme tous les collègues, j’étais absolument sidéré, ému. Ce que j’ai pu constater en salle des profs, c’est que les collègues ne parlaient que de ça », confie Jean-Luc Cornesse au micro de la rédaction de Magnum la Radio. La surveillante, tuée à coups de couteau dans l’exercice de ses fonctions, laisse une profession profondément marquée. « Elle intervenait pour accompagner les élèves et finalement, elle a été tuée. C’est incompréhensible. »

Le meurtre de Mélanie est ressenti comme une onde de choc. « Les violences scolaires, on les associait jusqu’à présent davantage aux États-Unis. Aujourd’hui, elles nous frappent ici, en France. » Pour Jean-Luc Cornesse, il est urgent d’analyser ce qui s’est produit. « Il faut prendre le temps d’analyser, de réfléchir à ce qui se passe dans nos établissements. »

Des propos recueillis par Juliette Schang
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Repérer les signaux faibles : une mission quasi impossible ?

Une des questions soulevées par le meurtre de Mélanie concerne la capacité des équipes éducatives à repérer les signaux avant-coureurs. « C’était une surprise d’apprendre qu’un élève de l’établissement ait pu passer à l’acte de cette façon », admet Jean-Luc Cornesse. « Par rapport à ces signes faibles, c’est très difficile à détecter. On a affaire à un élève qui passe à l’acte sans forcément avoir de mobile. »

Il ajoute : « Là, on n’a pas forcément de solution immédiate. Il nous faudra du temps. Mais une chose est sûre : il faut repenser notre manière de prévenir. »

Une crise du personnel soignant dans les établissements

« Il faudrait sans doute mieux prendre en compte la santé mentale des élèves », affirme le représentant syndical. Pour lui, le meurtre de Mélanie met en lumière un problème structurel : le manque de médecins, de psychologues et d’infirmiers dans les établissements scolaires. « On a besoin d’adultes pour que les élèves puissent être écoutés. »

L’annonce de la Première ministre Élisabeth Borne sur un renforcement des effectifs psychologiques est jugée timide : « Ce serait une mesure qui irait dans le bon sens, mais il faut des chiffres, des moyens, pas seulement des promesses. »

Des réponses sécuritaires qui interrogent

Les mesures annoncées par François Bayrou — contrôle de la vente d’armes blanches aux mineurs, portiques de sécurité — soulèvent des interrogations. Jean-Luc Cornesse se montre sceptique : « Interdire la vente de certains couteaux ? Très bien, mais un élève peut ramener un couteau de cuisine de chez lui. C’est une solution difficile à appliquer. »

Sur les portiques de sécurité, il est tout aussi réservé : « C’est une logique sécuritaire à laquelle, jusqu’à présent, on avait échappé. Il faudrait vraiment qu’on prenne le temps de réfléchir à ce que cela implique. »

Le meurtre de Mélanie ne doit pas servir de prétexte à une surenchère sécuritaire, estime-t-il. « La vidéosurveillance, par exemple, n’aurait rien changé à ce qui s’est produit. Ce sont des initiatives à chaud. Il faut du recul. »

Des propos recueillis par Juliette Schang

Prévention, encadrement, climat scolaire : des réponses de fond

« Les élèves subissent une forme de violence quand ils sont 35 ou 36 par classe », dénonce Jean-Luc Cornesse. Pour lui, c’est le climat scolaire qu’il faut reconstruire. « L’adolescent a besoin d’interactions avec le prof, avec les autres. Et pour ça, il faut plus d’enseignants, plus de moyens. »

Face au meurtre de Mélanie, il appelle le ministère à cesser les mesures cosmétiques : « Qu’on réunisse les organisations syndicales, qu’on réfléchisse ensemble à long terme. Il ne faut pas rassurer l’opinion à court terme, mais vraiment améliorer le quotidien dans les établissements. »

Il évoque aussi des pratiques récentes jugées inadaptées : « Demander au CIEN d’intervenir dans les écoles pour des missions de bien-être, ce n’est pas leur rôle. Il faut des professionnels formés. »

Des propos recueillis par Juliette Schang

Un hommage sobre, un besoin de recueillement

En mémoire de Mélanie, un moment de recueillement silencieux est prévu ce mercredi à 17h30, place de la mairie à Chaumont. « L’objectif, c’est de prendre le temps d’être ensemble, de se rassembler et de témoigner notre soutien à la famille, aux proches, aux collègues et à toute la communauté éducative. »
Jean-Luc Cornesse souligne l’importance de ces moments : « Au-delà des mots, il faut montrer que nous sommes solidaires, et que nous voulons que plus jamais un tel drame ne se reproduise. »

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