Télétravail prescrit par le médecin : une nouvelle forme d’arrêt de travail en débat dans le budget 2026

Le télétravail prescrit par le médecin pourrait devenir une alternative à l’arrêt maladie : une option encadrée dans le budget 2026 pour éviter le tout ou rien.

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L’amendement porté par Stéphane Viry ouvre la voie à un « télétravail prescrit par le médecin », une alternative à l’arrêt complet, lorsque l’état de santé du salarié le permet.

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Des propos recueillis par Juliette Schang

Et si, demain, un arrêt maladie ne rimait plus forcément avec immobilisation ? Dans le cadre du budget 2026, un amendement propose de permettre un télétravail prescrit par le médecin, lorsqu’un salarié est temporairement inapte à se déplacer mais capable de travailler à distance. Cette idée est portée par les députés Stéphane Viry (LIOT) et Nicolas Turquois (Modem), qui souhaitent adapter le droit du travail aux réalités médicales et professionnelles actuelles.

Cette proposition de télétravail prescrit par le médecin pourrait concerner les salariés opérés d’une cheville, d’un pied ou d’un genou, par exemple : ils ne peuvent pas conduire ou se rendre en entreprise, mais sont parfois capables de reprendre progressivement leurs missions depuis leur domicile. Aujourd’hui, la loi ne permet pas cette nuance. C’est soit l’arrêt complet, soit la reprise totale.

Interrogé, Stéphane Viry décrit une logique « de bon sens » :

« J’ai proposé d’ouvrir la faculté — ce n’est pas une obligation — d’une reprise du travail pour un salarié qui serait en incapacité de se déplacer, dès lors que son état de santé le permet, que son médecin est d’accord et que son employeur est également d’accord. »

Selon lui, le télétravail prescrit par le médecin permettrait d’éviter un effet « tout ou rien » lorsque le salarié souhaite retravailler. Dans certains cas, travailler à distance limiterait le risque d’isolement et de désinsertion professionnelle.

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Les avantages du télétravail prescrit par le médecin

Le premier bénéficiaire serait le salarié. Le télétravail prescrit par le médecin pourrait :

  • éviter une perte de salaire, puisque l’arrêt maladie ne couvre pas toujours 100 % de la rémunération ;
  • maintenir un lien avec l’entreprise ;
  • favoriser une reprise progressive de l’activité.

Stéphane Viry souligne : « Il peut arriver qu’un salarié ait envie de se remettre dans ses dossiers. Cela peut l’aider à éviter une désinsertion professionnelle, surtout s’il reste éloigné du monde du travail pendant plusieurs semaines. »

Pour les entreprises, le télétravail prescrit par le médecin pourrait éviter une vacance prolongée de certains postes. Un salarié qui reprend partiellement son activité, même à distance, peut maintenir une continuité de production, tout en restant protégé par une surveillance médicale.

Enfin, cette solution pourrait contribuer à freiner l’augmentation du coût des arrêts maladie. « Ces deux dernières années, on approche les 10 milliards d’euros de dépenses liées aux arrêts de travail », rappelle le député. Selon lui, si le télétravail prescrit par le médecin permet à la fois une reprise d’activité et des économies modérées pour la Sécurité sociale, il mérite d’être testé.


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Un cadre strict à respecter

Attention : le télétravail prescrit par le médecin ne s’appliquerait qu’aux postes télétravaillables. Il reposerait sur l’accord des trois parties : le salarié, le médecin et l’employeur. Aucun d’eux ne serait obligé d’accepter. L’idée n’est pas de supprimer les arrêts de travail, mais d’offrir une troisième voie lorsque la santé le permet.

Selon le député, le télétravail prescrit par le médecin n’a pas vocation à devenir la norme mais une alternative encadrée, destinée à certains cas médicaux identifiés par le corps médical. Il ne remplacerait pas l’arrêt de travail classique, il s’ajouterait simplement à la panoplie d’options médicales disponibles.


L’avenir de la mesure encore incertain

Pour l’instant, le gouvernement ne l’a pas retenue. Mais l’amendement sur le télétravail prescrit par le médecin arrive au Sénat, et plusieurs parlementaires pourraient le reprendre. En cas d’échec au Sénat, il pourrait revenir à l’Assemblée en deuxième lecture. Stéphane Viry assure qu’il poursuivra la réflexion avec les partenaires sociaux et les professionnels de santé au premier trimestre 2026.

« Même hors cadre législatif, il faudra continuer à discuter. Il existe des pistes de réforme qui ne passent pas forcément par une loi mais par de l’influence et de la proposition », explique-t-il.


Une vision plus large du travail et de la santé

Au-delà de cet amendement, la proposition de télétravail prescrit par le médecin fait partie d’une réflexion plus globale sur la valeur du travail et la protection sociale. « Je suis pour revaloriser l’acte de travailler, son sens, sa valeur », insiste Stéphane Viry. Selon lui, si un salarié peut retravailler sans mettre en danger sa santé, il faut s’interroger sur la manière de lui permettre de le faire.

Le député met aussi en garde : « Notre système de santé est à bout de souffle. On dépense chaque année davantage d’argent public, et pourtant les résultats se dégradent. Si on ne réagit pas, le reste à charge individuel va augmenter, et certains Français n’auront plus les moyens de se soigner. »

Le télétravail prescrit par le médecin, même limité, pourrait donc devenir un symbole : celui d’un système de santé plus souple, plus moderne, et adapté à la réalité du travail à distance.

Reste à savoir si le Sénat en fera une nouveauté du droit du travail… ou une idée à développer en coulisses.