La justice prive une famille d’eau courante à la Chapelle-aux-Bois (88)
À La Chapelle-aux-Bois, un maréchal-ferrant se retrouve privé d’eau courante après une décision de justice, mettant en péril sa famille et son activité.
Bastien Saint-Dizier, maréchal-ferrant à La Chapelle-aux-Bois, a été contraint ce mardi de détruire la seule canalisation qui alimentait sa maison et son écurie. Une décision de la justice qui menace son activité professionnelle, mais aussi l’alimentation en eau de sa famille et de la trentaine de chevaux qu’il héberge. Cette situation, fruit d’un litige ancien, illustre à quel point des décisions judiciaires peuvent bouleverser la vie quotidienne d’un citoyen.
Une canalisation au cœur d’un litige ancien
Tout a commencé à la fin des années 2010, lorsque Bastien Saint-Dizier, nouvel arrivant dans le village, a dû réparer une canalisation souterraine endommagée par un exploitant agricole voisin. « Avec un accord écrit du locataire, nous nous étions mis d’accord pour restaurer la conduite avec un tuyau neuf », précise Bastien Saint-Dizier. Cette canalisation permettait d’acheminer l’eau de source vers sa maison et son écurie, un droit reconnu par un acte notarié datant de 1962, réactualisé en 1998, 2013 et 2016 lors de l’achat de sa propriété.
La voisine, propriétaire du terrain sur lequel passait une partie de la canalisation, a contesté l’utilisation de cette eau et déposé plainte. Pour Bastien Saint-Dizier, la décision de justice qui l’oblige aujourd’hui à détruire la canalisation « est complètement absurde. On est actuellement privé d’eau alors que cette voisine ne subit aucun préjudice, elle bénéficie d’une source en amont et d’un raccordement sur sa maison ».
Une décision judiciaire lourde de conséquences
Le tribunal d’Épinal, puis la cour d’appel de Nancy, ont confirmé que la canalisation était irrégulière. En plus de l’obligation de la détruire, Bastien Saint-Dizier se voit imposer une astreinte de 100 € par jour depuis le 13 mai, soit environ 10 000 € à payer. « On prend une amende mais on ne sait pas pour quelles raisons, dans le sens où personne ne subit de préjudice à part nous », déplore-t-il.
L’impact sur la vie quotidienne et professionnelle est immédiat. « Mardi, le 19 août, on a dû procéder à la destruction de la chambre de fontaine, ce qui est complètement absurde », explique-t-il. L’eau qui s’écoule désormais librement sur le terrain menace même des constructions récentes, et le maréchal-ferrant doit s’approvisionner en citernes chaque jour pour continuer à alimenter sa maison et les abreuvoirs des chevaux.

Une solution provisoire insuffisante pour l’eau
À 180 mètres de la maison se trouve un compteur d’eau inutilisé, mais le débit ne permet pas d’alimenter correctement une exploitation et une habitation. « Le débit de ce compteur d’eau équivaut à un abreuvoir ou un robinet de cuisine. Il est donc impossible de l’utiliser pour notre activité », précise Bastien Saint-Dizier. Chaque jour, il met en place des rotations de citernes grâce à ses voisins pour subvenir aux besoins de sa famille et continuer à nourrir ses chevaux.
« On est en 2025 et aujourd’hui on ne revit peut-être pas comme au Moyen-Âge, mais on s’en rapproche. On est obligés de faire des citernes pour aller se laver, pour donner à boire aux chevaux… C’est une attaque à la dignité humaine », confie Bastien Saint-Dizier.
En appliquant la décision judiciaire, Bastien Saint-Dizier a dû prévenir la police de l’eau. « J’ai été contraint de contacter la police de l’eau pour expliquer que les documents recensant toutes les sources d’eau souterraines dans le département ne seront plus officiels », raconte-t-il. La destruction de la canalisation, pourtant imposée par la justice, rend ainsi illégalement invisible une source recensée depuis des décennies. « En appliquant ce jugement, j’ai basculé dans une certaine illégalité… On marche sur la tête », ajoute-t-il, dépité.

Un combat personnel et humain
Pour Bastien Saint-Dizier, ce litige dépasse la simple question juridique. Il touche à la dignité mais aussi à la survie de son activité : « La solution qu’il nous reste aujourd’hui, c’est d’aller en appel. Mais j’ai un énorme doute. J’ai tendance à ne plus faire confiance à la politique et à la justice », confie-t-il. La canalisation, symbole de sa lutte, devient également le témoignage d’une bataille pour sa famille et son entreprise.
« Aujourd’hui, on est dépités, on ne sait pas quoi faire, on ne sait pas par quoi commencer. On a travaillé dur pour une qualité de vie meilleure, mais au final, j’ai l’impression que ça ne sert pas à grand-chose », confie-t-il à nouveau, désemparé.

Un espoir malgré tout
Malgré ce coup dur, Bastien Saint-Dizier conserve un objectif simple et déterminé : « UN DUR LABEUR POUR UNE QUALITÉ DE VIE MEILLEURE !! Nous voulons juste travailler en paix », écrit-il sur sa page Facebook. L’homme espère que la justice reconnaîtra finalement son droit sur cette canalisation et qu’il pourra retrouver une vie normale, avec l’eau indispensable à sa famille et à son activité.
Cette affaire met en lumière la complexité des droits liés à l’eau et les conséquences humaines d’une procédure judiciaire prolongée. Pour Bastien Saint-Dizier, la destruction de cette canalisation n’est pas seulement un obstacle matériel : elle représente une lutte pour le respect d’un droit acquis depuis plus de cinquante ans et la survie d’une entreprise familiale.
Contactée par la rédaction, la voisine n’a pas donné suite à nos sollicitations.
